Symptômes d'inconfort en soins palliatifs et situations d'urgence
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14. L'hydratation
De façon physiologique, c’est la soif qui permet de réguler les apports mais il y a une diminution de la sensation de soif avec l’âge.
De façon pathologique, les patients ont moins d’ingestat du fait des symptômes potentiels suivants :
- anorexie
- odynophagie, douleur de gorge
- lésions de la cavité buccale
- nausées – vomissements
- retard de la vidange gastrique
- altérations cognitives, dépression
Mais en fin de vie, les besoins sont moindres du fait de :
- la diminution des efforts
- la diminution du poids corporel
- la diminution des pertes insensibles (sauf si fièvre)
- la diminution de l’élimination de l’eau libre, la sécrétion inappropriée d’ADH pathologique (syndrome paranéoplasique) ou iatrogénique (morphine)
Il n’y a pas de position « pour » ou « contre » a priori une hydratation artificielle mais une réponse liée à une approche individualisée.
Symptômes potentiellement liés à la déshydratation : constipation, hyperthermie, soif et ± sécheresse de la bouche, confusion, agitation, majoration des douleurs, toxicité des traitements (accumulation des métabolites toxiques)
| Arguments décisionnels
- la soif exprimée : l’hydratation est alors indiquée en sachant qu’il n’y a pas forcément de soulagement à la soif… par l’hydratation (dysrégulation centrale)
- les désirs du patient :
- soit le patient souhaite une hydratation artificielle ; les bénéfices et les inconvénients doivent lui être expliqués
- soit les soignants pensent qu’une hydratation artificielle est indiquée et le patient la refuse : ce refus doit être interrogé ; y a-t-il : une dépression sous-jacente ? une confusion ? ou s’agit-il d’un refus conscient ?
- L’état général du patient : si le patient est en phase terminale, il y aurait libération de cétones ayant un effet anesthésique et des « avantages » à la déshydratation comme :
- moins de mictions
- un obscurcissement de la conscience qui n’est pas forcément source d’inconfort (diminution de l’angoisse)
- moins de risque de surcharge liquidienne…
- Les perceptions de l’équipe : pour certains, l’hydratation constitue le minimum de soins et l’arrêt, un abandon du patient
- Les perceptions de la famille qui peut avoir peur que le patient ne « meure de soif » et qui considère également qu’hydrater le patient constitue le minimum des soins
| Modalités thérapeutiques
Les soins de bouche : Cf. Chapitre 12 « Les atteintes buccales »
La voie orale tant qu’elle est possible reste privilégiée.
Hydratation par voie sous-cutanée :
- siège : partie supérieure du corps (deltoïdes, zones sous claviculaires…).
- matériel : butterfly 21-23
- compresse opsite® pour recouvrir l’ailette et pouvoir surveiller la zone de ponction
- solutés :
- NaCl 9°/°° diffuse mieux que le G5% (à privilégier quand traitements par voie SC).
- pas de maximum mais généralement 500 cc/24 h. Si nécessité de réhydrater le patient, on peut installer plusieurs sites (750 cc/site maximum).
- durée : pas de durée limite ; elle est déterminée par la surveillance de la tolérance
- contre-indications (rarissimes) : œdèmes diffus, troubles de la coagulation, infections cutanées
Hydratation par voie IV, elle sera choisie préférentiellement :
- s’il existe un site implantable (patient ayant eu de la chimiothérapie) ou une voie centrale
- elle ne doit pas être réalisée par voie périphérique pour des durées prolongées
- si la nécessité d’utiliser d’autres traitements par voie IV s’impose
Autant une hydratation artificielle peut être indiquée en cas de déshydratation symptomatique, autant il faut avoir présents à l’esprit les inconvénients possibles de l’hydratation de principe :
- prolongement potentiel de la phase terminale
- production accrue d’urines
- augmentation des sécrétions digestives et bronchiques (majoration de la toux….)
- limitation de l’autonomie par le biais des perfusions
- risque de surcharge : surtout si elle se fait par voie IV
Il faut donc rechercher un consensus incluant les points de vue médicaux et « affectifs », exposer les différentes alternatives et justifier le choix… (avantages et inconvénients des décisions) et réévaluer dans le temps ! !