13. L'anorexie et la cachexie

L’anorexie est un des symptômes les plus fréquents en phase palliative s’inscrivant le plus souvent dans un tableau de cachexie.
L’anorexie pose directement le problème de l’alimentation, questionnement central en Soins Palliatifs à la fois pour le patient, les familles et les équipes soignantes.
Avant toute décision thérapeutique, il est important de faire une évaluation nutritionnelle du patient.


| Évaluation nutritionnelle

  • interrogatoire :
    • sur les antécédents alimentaires récents
    • existence de symptômes associés : douleur, asthénie, constipation, lésions buccales ou sécheresse de bouche, anxiété et dépression
    • sur les demandes du patient : a-t-il faim et demande t-il à manger?
    • sur les goûts et habitudes du patient
  • examen clinique :
    • recherche d’une amyotrophie et de signes de déshydratation
    • recherche de lésions buccales pouvant être à la base de l’anorexie
    • la pesée du patient et le chiffrage de la perte de poids récente ne se font que lorsqu’il existe des possibilités de renutrition ou dans le cadre d’un bilan préthérapeutique


| La prise en charge

  • Éliminer les causes possibles de l’anorexie :
    • traitement de la douleur
    • prise en charge des nausées et vomissements
    • traitement des atteintes buccales avec intensification des soins de bouche
    • prise en charge de l’angoisse et du syndrome dépressif
    • prise en charge de la constipation

  • La place des corticoÏdes et/ou progestatifs :

L’appétit peut être stimulé par des petites doses de corticoïdes quotidiennes le matin (Solupred® PO ou Solumédrol® IV: 0,25 à 0,5 mg/kg/j).
Place peu importante aux progestatifs porexigènes : acetate de medroxyprogesterone (500 mg/j en une prise) : Depo-Provera®, Divina-Duova®

  • La prise en charge nutritionnelle :

Il faut avoir présent à l’esprit que le syndrome anorexie-cachexie est associé à de nombreuses pathologies (cancéreuse, infectieuse ou dégénérative) par le biais de mécanismes biochimiques complexes.
Si la maladie elle-même échappe au contrôle, ce symptôme échappera également. Il peut constituer, en dehors des causes précédemment énumérées, un syndrome incurable, contre lequel « gavage » et alimentations artificielles n’amélioreront ni la qualité de vie ni l’espérance de vie.


◊ L’alimentation Per Os

Toujours dans une dynamique palliative de confort, la notion de plaisir dans l’alimentation est essentielle. C’est dans ce but que le patient ne sera ni forcé ni stimulé pour manger. C’est à partir du moment où le patient émet le souhait de manger, que la voie per os sera privilégiée (si celle-ci reste encore possible) et favorisée par :

  • la flexibilité dans l’horaire des repas
  • l’adaptation des repas aux goûts du patient
  • le fractionnement des repas
  • présentation attrayante des plateaux

Parfois le patient ne demande rien mais c’est la famille qui souffre de ne pas voir s’alimenter leur proche avec la peur de le voir « mourir de faim » ou « que les escarres s’aggravent ». Il est alors important de pouvoir expliquer à la famille que même un apport calorique conséquent ne freinera pas le processus de dégradation de l’état général enclenché par la maladie cancéreuse, l’anorexie s’inscrivant dans un syndrome paranéoplasique (conséquence de la maladie évolutive).

Lorsque l’alimentation per os est impossible (fausses routes, obstacle sur les voies aéro- digestivse) et que le patient est en demande de nutrition, on pourra envisager avec lui une autre forme d’alimentation n’altérant pas son confort.

On retrouve ce type de situation souvent dans des contextes de pathologie neurologique dégénérative impliquant des prises en charge à moyen et à long terme.

◊ L’alimentation entérale

La sonde nasogastrique :

  • souvent traumatique et inconfortable pour le patient, donc on essaye de l’utiliser le moins souvent en soins palliatifs, surtout concernant une alimentation

La gastrostomie simple :

  • possible chez les patients ayant une espérance de vie prolongée en particulier les patients atteints de pathologie neurologique dégénérative
  • avantage : geste chirurgical simple, rapide et peu douloureux
  • inconvénients : possibilité́ de reflux gastro-œsophagien avec risque de fausses routes et de pneumopathie par reflux et encombrement pulmonaire chronique

◊ L’alimentation parentérale

  • possible uniquement chez le patient porteur d’une voie veineuse centrale ou d’un PAC ; et en cas d’impossibilité d’alimentation entérale
  • comporte des risques infectieux importants
  • risque d’aggraver une encéphalopathie hépatique en cours
  • technique onéreuse
  • peu pratiquée en soins palliatifs (concerne surtout les soins palliatifs précoces avec projets thérapeutiques nécessitant un bon état nutritionnel)

L’alimentation Entérale ou Parentérale ne sera envisagée que dans le cas où l’alimentation orale est impossible et à la demande du patient, informé de l’évolution de sa maladie. Elle ne doit pas générer plus d’inconfort pour le patient et se situe plus dans le cadre d’une prise en charge à moyen et long terme, en particulier chez les patients atteints de pathologies neurologiques dégénératives.
Seule une écoute et un examen clinique de qualité permettront au médecin, dans le cadre d’une l’interdisciplinarité, de prendre la bonne décision dans la prise en charge nutritionnelle d’un patient en Soins Palliatifs.